30 décembre 2010

de l'envie de dessiner des spirales

ça commence par n'avoir rien à voir du tout avec les spirales. au début c'est juste une chanson country-pop qui s'est infiltrée dans nos oreilles pour ensuite refuser d'en sortir. alors, on écrit la partie la plus catchy sur un petit rectangle de papier blanc. on le plie en quatre et on le glisse dans la poche arrière de nos jeans, dans l'espoir d'arrêter de penser au silence quite this loud. on est encore bien loin des spirales.

on pense surtout à tracer de jolies lettres qui formeraient des mots phrases citations chansons. alors bien sûr, bien sûr! on a besoin de nouveau papier. tout le monde sait que les carnets déjà griffonnés, n'en seraient-ce que les pages du début, ne sont pas assez bons quand on veut entreprendre d'assembler de jolies lettres.

quel parfait prétexte pour aller caresser des textures de papier comme si on y connaissait quoi que ce soit, comme si ça faisait toute la différence du monde. on choisit une tablette de bristol lisse à la couverture rouge. voisine du carnet mix media bleu, on constate que ça serait joli chez nous aussi. comment résister alors à l'appel des surligneurs sharpie, jaunes, pas fluo mais vrai jaune primaire? on ajoute à tout ça un carnet noir spiralé, plus petit, et ça ne dérange rien parce que le noir n'est même pas une couleur. les faber-castell sont noirs aussi; notre color scheme est sauf.

à la caisse, on demande si les sacs coûtent cinq sous. comme si c'était une évidence, on se fait répondre que «ça coute rien, les sacs» et on se retient pour ne pas corriger cette affirmation. une fois de plus, on ne comprend pas que les employés de ce magasin de matériel pour artistes ne soient pas plus enthousiastes. si on avait la chance de côtoyer autant de gens qui veulent fabriquer des choses, on serait beaucoup plus sympathique.

à ce moment-là, on veut seulement quitter.

et je réalise que ça ne me tente plus d'écrire à la troisième personne.
c'est un peu bizarre.

je sais plus trop où je m'en allais quand j'ai commencé à écrire. je pense que c'était lié à l'angoisse de la première page, d'où la spirale, parce que c'est facile à dessiner et ça peut devenir joli sans trop d'effort. avant, j'en dessinais tout le temps, en arrière-plan de drôles de visages vaguement monstrueux aux yeux toujours inégaux.

ça fait un bout de temps que j'écris pour ne rien dire, mais c'est un peu mensonger, j'ai des choses à dire n'importe quand, c'est juste que j'ose rarement. aujourd'hui je me sens assez loin de moi pour que ça ne me dérange presque pas. ça aide, se sentir comme si on n'était pas soi.

c'est pas nouveau, mais c'était moins pire depuis un moment.

je sens l'ennui me grimper le long des membres. je suis lasse. j'ai envie de passer tout mon temps le nez plongé dans des livres qui racontent tout sauf la vraie vie. je veux dessiner et ne rien montrer aux gens. je veux acheter une toute petite maison, dans un cul-de-sac, et peindre des citations sur les murs.

mais pour ça, je dois pratiquer mes plus belles calligraphies et vaincre l'angoisse de performance de la première page. d'où l'envie de tricher et de dessiner des spirales.

ce texte a été écrit à l'encre rouge.

5 commentaires:

Mélanie J. a dit…

J'ai trouvé que j'écrivais incroyablement plus dans un cahier laid. Parce que j'ai pas peur de le salir avec mes mots laids, je m'en fou parce que c'est un fucking cahier spirale bleu royal et noir à 2 $ anyway.

manouche a dit…

Il me semblait que plus j'écrivais vite et mal plus le mot avait de sens...

Clarence L'inspecteur a dit…

Je t'ai déjà dit ce que je pense de ces textes mi-ironiques, mi-mélancoliques si bien exécutés, comme de beaux brouillons un peu salis par des traces de doigts. Histoire de faire une métaphore poche sur le fait que t'es une artiste.

J'en pense du bien.

Marie a dit…

J'en redemande. Belle découverte que ce blog.

Sara a dit…

@Mélanie: Ouin, mon angoisse entre en contradiction avec mon amour des beaux cahiers...
@manouche: Faudrait que je fasse ça plus souvent.
@Clarence: T'es gentil avec moi, merci!
@Marie: J'suis pas très assidue, mais reviens quand tu veux! :)